Gervais Gaudreault devient artiste associé au Carrousel

L’émotion qui nous habite est puissante.

Après 47 saisons à la barre de la compagnie de théâtre qu’il a fondée en 1975 avec Suzanne Lebeau, Gervais Gaudreault laisse la codirection artistique du Carrousel.

Marie-Eve Huot, à qui il a enseigné à l’École nationale de théâtre du Canada et à laquelle il a transmis son expertise, ses compétences et ses savoir-faire, lui rend cet hommage.

« Depuis plusieurs années, je marche aux côtés d’un homme d’exception. Il m’a accompagnée dans mon parcours tel un père que j’aurai choisi. Il a participé à l’élévation de mon regard artistique, celui que je pose sur le théâtre, l’art, le monde. Il a interpelé la femme de théâtre en moi autant que la citoyenne que je suis : le côtoyer m’oblige à me dépasser sans cesse et m’incite à intérioriser chaque décision que je prends, chaque geste artistique que je déploie, chaque action rassembleuse que je tends à mener.

J’ai rencontré pour la première fois Gervais Gaudreault en 2004, à l’École nationale de théâtre du Canada. Sa réputation de fin pédagogue et de metteur en scène brillant l’avait précédé : le groupe auquel j’appartenais à l’époque l’attendait avec une fébrilité palpable. Nous avions tous entendu parler de l’homme de théâtre et nous savions que sa présence dans notre formation allait faire une différence. Pour moi, la différence a été telle qu’elle a sans aucun doute orienté mon parcours professionnel.

La suite s’est enclenchée d’une manière naturelle. J’ai été accueillie au Carrousel d’abord comme stagiaire, puis comme artiste associée et, finalement, j’ai pris le relais de Suzanne Lebeau aux côtés de Gervais à la codirection artistique de la compagnie.

Le côtoyer au quotidien a été un privilège.

Gervais fait partie de ces quelques visionnaires, ces créateurs, qui, il y a quarante ans, ont donné des formes et des lieux à une utopie, et qui ont développé une véritable expertise jeune public reconnue ici et sur la scène internationale. En 1984, avec des collègues, il fondait la Maison Théâtre, un espace qui offrirait à la fois aux enfants et aux artistes des conditions idéales pour la diffusion des spectacles, et le développement de la pratique professionnelle jeune public. Ces dernières années, il s’est consacré au développement du Cube, centre international de recherche et de création en théâtre pour l’enfance et la jeunesse.

Au-delà de son inscription à l’encre indélébile dans la courte mais dense histoire du théâtre jeune public québécois, Gervais Gaudreault constitue également une référence spécifique dans la manière d’aborder une mise en scène. Par son approche métaphorique de l’espace scénique et son travail d’évocation sensible, Gervais Gaudreault a façonné la signature du Carrousel pendant quatre décennies. Le duo formé avec Suzanne Lebeau a généré des spectacles qui ont successivement propulsé l’histoire et l’évolution de la création jeune public. GilContes d’enfants réelsSalvadorL’Ogrelet… constituent autant de jalons d’une carrière qui se poursuit aujourd’hui encore avec Le bruit des os qui craquentGretel et Hansel ou Trois petites sœurs. Parallèlement à son travail de metteur en scène, il a développé une réflexion sur la voix et le corps de l’interprète dans l’espace. Il est reconnu de par le monde pour son travail de directeur d’acteurs, encourageant ces derniers à recourir à un jeu qui évoque l’enfance plutôt que de faire l’enfant. Il a signé 31 mises en scène dont 18 pour le Carrousel. Ses spectacles ont été présentés dans 17 pays, sur quatre continents, en sept langues (français, anglais, espagnol, italien, japonais, mandarin, polonais). Pédagogue, il a transmis ses connaissances à plus d’une génération d’acteurs et de créateurs, à l’École nationale de théâtre du Canada, à l’Option Théâtre du Collège Lionel-Groulx et à l’École supérieure de théâtre de l’UQAM, entre autres.

Une carrière qui m’inspire et me met au défi.

Enfin, je ne peux passer sous silence ses qualités d’homme de cœur, attentif à la relève qu’il a pris toute sa vie sous son aile, à son évolution, à son avenir dans la profession, à ses difficultés. Il se montre le plus souvent exigeant, mais toujours avec une bienveillance et une tendresse non feintes qui provoquent un choc émotionnel salutaire. »

C’est désormais à titre de metteur en scène / chercheur, que Le Carrousel s’engage à soutenir Gervais Gaudreault dans la finalisation du spectacle Frontière Nord, de même que dans un travail de reconnaissance historique de son parcours artistique exceptionnel. Cher Gervais, le conseil d’administration, l’équipe permanente et les nombreuses équipes de spectacles te souhaitent le meilleur pour la suite du monde.