Les cahiers du 50e
Sophie Labelle

J’ai presque vingt ans et j’étudie à l’école de théâtre. Gervais Gaudreault est mon professeur de voix. Dans nos cours, j’entends pour la première fois Suzanne, Carrousel, jeune public. Gervais nous invite à voir un spectacle. C’est Salvador. Je découvre à la fois Suzanne Lebeau et Jean-Guy Viau. L’une m’éblouit et l’autre me charme. Je sors de l’école et j’emprunte le chemin qui me mènera 20 ans plus tard à la direction artistique de la Maison Théâtre. Au début je travaille en jeune public. Je vois d’autres spectacles. Je lis des textes. Je garde un lien, même de loin, pendant toutes ces années. Et à mon arrivée à la Maison Théâtre je retrouve Le Carrousel, en pleine transition artistique. D’un côté il y a les piliers, les fondateur et fondatrice que j’ai la chance de côtoyer à nouveau pour apprendre et approfondir et de l’autre, il y a Marie-Eve Huot, une artiste brillante et sensible, une interlocutrice attentive avec qui je chemine, cherche et construis. J’ai de la chance. Le milieu jeune public et les enfants ont de la chance. L’humanité a de la chance. Le Carrousel, c’est un espace fertile d’une rigueur peu commune, où poussent des voix résistantes et déliées, où naissent des images saisissantes. Leurs spectacles s’adressent à l’ensemble de ce qui nous constitue comme humain·e, nos contrastes, nos conflits, nos aspirations. Dans ce que j’ai vu et qui me reste à voir, il y a eu et il y aura des fragments de nos plus grandes pertes et de nos plus douces tendresses, cette manière unique de combiner deuil et espérance. Le Carrousel nous a déjà donné beaucoup, et c’est éminemment précieux que ça se poursuive.

Bon 50e.

Sophie Labelle
Directrice artistique de la Maison Théâtre

 

Descriptif de la photo :

Salvador de Suzanne Lebeau, mise en scène de Gervais Gaudreault
Le spectacle a été créé en 1994; photographie prise en 2008 lors de la reprise du spectacle.
Sur la photo : Jean-Guy Viau
Crédit photo : François-Xavier Gaudreault