
Les cahiers du 50e
Pierre-Etienne Locas
50 ans de Carrousel.
Ça fait combien de projets, ça ? Combien de spectacles ?
Combien d’idées ?
Combien de réussites combien d’échecs combien d’embûches combien de solutions combien de nuits blanches combien d’épiphanies combien de doutes combien de mains tendues ?
Et combien de rencontres, combien d’humains ?
De créateurs d’administrateurs de diffuseurs de fabriqueurs d’imagineurs de donneurs de défricheurs de solutionneurs de supporteurs d’inventeurs de rêveurs ?
Et de spectateurs, parce qu’au final c’est pour eux, grâce à eux. Sans les spectateurs on le ferait en vain.
C’est un bon deal je trouve, ils nous offrent le privilège de créer, réfléchir l’existence, sonder l’humanité, raconter le ressenti, nous leur présentons nos trouvailles et nos questions dans une petite offrande théâtrale emballée ou déballée, soignée ou débraillée, exaltée ou écorchée.
Des spectateurs, des enfants, qui se déplacent et viennent s’asseoir dans leur siège dans le noir, se taisent, écoutent, prennent un moment pour recevoir.
Et quand la lumière se rallumera, peut-être se relèveront-ils un peu différents, animés ou ébranlés, émus ou inspirés.
Ce sera bientôt 20 ans de scénographie pour moi.
Ça fait combien de projets, ça ? Combien de spectacles ?
Combien d’idées ?
Combien de réussites combien d’échecs…
Et combien de rencontres ?
L’éphémérité du théâtre : imaginer fabriquer présenter remballer.
Qu’en reste-t-il ? Une trace ou une empreinte, l’écho d’une réflexion, une étagère pleine de carnets de notes.
Il y a eu des rencontres.
Des rencontres qui mènent à des discussions, des discussions qui mènent à
des partages, des partages qui mènent à des émotions.
Des rencontres pour mener un projet, mener un projet pour questionner, questionner pour chercher, chercher pour se mettre en mouvement, se mettre en mouvement pour s’animer.
Des gens qui s’émeuvent et s’animent ensemble ça donne de la vie, ça donne de l’amitié.
Un jour, j’ai reçu l’invitation du Carrousel à venir prendre le temps.
Venir essayer et se tromper, fouiller et réessayer.
Nous avons échangé.
Nous avons philosophé.
Nous avons exploré.
Nous avons pleuré.
Nous nous sommes égarés, nous nous sommes remis en question.
Nous avons créé.
Nous qui étions réunis, en cette époque et en ce lieu, aussi humblement et authentiquement que possible, à la lumière des invités rassemblés et au meilleur de nous-mêmes, nous avons créé. Sensibles au rythme du projet, des échanges et de ce qui tranquillement se révélait, nous avons pris le temps, le temps de rencontrer.
Ça fait 50 ans, ça fait 20 ans et on regarde en avant.
Mais de temps en temps, un petit coup d’œil en arrière et faire la somme des rencontres.
Ça donne envie de continuer.
Bravo Carrousel, à bientôt…
Pierre-Etienne Locas
Scénographe
Descriptif de la photo :
Image extraite du Chantier numérique élaboré par Félix Dagenais et Juliette Granger, autour du spectacle Antigone sous le soleil de midi. L’image est tirée de la vidéo filmée à l’intérieur de l’œuvre installative de Pierre-Etienne Locas; œuvre qui accompagne le spectacle et qui comprend plus de 70 figurines de terre cuite, semblables à celles utilisées sur scène. Cette installation est accompagnée d’un environnement sonore signé Diane Labrosse et Pierre Tanguay.
Figurines : Pierre-Etienne Locas
Image : Félix Dagenais et Juliette Granger